adages
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.
Le Deal du moment :
Display Star Wars Unlimited Ombres de la Galaxie : ...
Voir le deal

Prolégomène 4 : Des différences entre l’adage et les formes qui lui sont proches (A. Laimé)

Aller en bas

Prolégomène 4 : Des différences entre l’adage et les formes qui lui sont proches (A. Laimé) Empty Prolégomène 4 : Des différences entre l’adage et les formes qui lui sont proches (A. Laimé)

Message  JCS Ven 8 Mai - 10:37

Il y a des formes proches des adages : pensez aux gnômai, que les nôtres appellent sentences ; rajoutons les ainoi, que les nôtres désignent du terme d’apologues. Il y a aussi les apophthegmata, qu’il conviendra de traduire par propos brefs et frappés. En outre, il y a les skômmata, c’est-à-dire des propos spirituels. Bref, tout ce qui, comme derrière une sorte de masque, se dissimule derrière une allégorie ou quelque autre figure de style propre aux proverbes. Bien qu’il ne soit pas difficile de distinguer ces formes du genre de l’adage, pour peu qu’on sache les confronter à la définition comme à un gnomon ou une règle, j’expliquerai pourtant volontiers ce qu’il en est, de façon assez simple et, comme on dit, en m’en tenant au gros bons sens, afin de satisfaire aussi ceux qui ont moins de connaissances sur le sujet. On saura alors clairement quel est mon dessein dans cet ouvrage.
D’abord, la sentence et l’adage ont ce rapport entre eux que chacun d’eux peut être associé à l’autre. En retour, on ne peut les séparer l’une de l’autre autrement que comme on peut disjoindre l’idée de « blanc » de celle d’ « homme ». De même que ce qui est homme n’est pas forcément blanc, et que ce qui est blanc n’est pas aussitôt homme, rien n’empêche ce qui est homme d’être blanc. Ainsi il n’est pas rare qu’une sentence renferme un proverbe, sans que ce qui fut un adage soit forcément aussi une sentence, ni le contraire. Ainsi en est-il de « L’avare manque de ce qu’il a autant que de ce qu’il n’a pas » ; ou encore de « L’envie se repaît des vivants, mais après leur mort, elle se tient tranquille» : ce sont des sentences, mais pas pour autant des adages. A l’opposé, « Je navigue au port » est un proverbe mais ce n’est pas une sentence. En revanche « Ne donne pas un glaive à un enfant » participe à la fois de la nature de l’adage et de la sentence, et qui plus est de l’allégorie. Il y en eut pourtant, surtout chez les Grecs, pour entreprendre volontiers d’écrire une gnomologie, c’est-à-dire un recueil de sentences, parmi lesquels l’éminent Jean Stobée. Pour ma part, j’aurais plus tôt fait de louer leurs œuvres que de les imiter.
Passons au reste : Aphtonius dans ses Progymnasmata appelle l’ainos du simple nom de muthos, c’est-à-dire fable ; on le surnomme de diverses manières, selon le nom de l’inventeur : sybarite, cilicien, chypriote, ésopique. Quintilien dit que les Grecs le nomment logon muthikon aisôpopoièton, certains latins apologue, nom dont on ne fait pas assez usage. Il convient bien que l’ainos est proche de l’adage, mais il faut, selon lui, les distinguer l’un de l’autre dans la mesure où l’ainos est une fable complète, et l’adage est plus bref et ressemble à une fable en miniature. Comme exemple il donne « Ce n’est pas à nous de porter les paniers, c’est au bœuf ». C’est ainsi qu’en a usé Hésiode : « Maintenant aux rois, tout sages qu’ils sont, je conterai une fable, bien qu’ils la connaissent bien : voici ce que l’épervier dit au rossignol au col tacheté ». Archiloque et Callimaque en usent de la même façon, même si Théocrite dans L’Amour de Kyniska semble avoir utilisé ainos à la place du mot adage : « Il y a un proverbe qui dit "Tel le taureau est parti dans les bois" » ; quant aux apophtegmes, ils diffèrent des adages dans la même mesure que les sentences. En effet, de même que la phrase « Qui n’a pas de pouvoir sur soi-même veut en avoir sur Samos » est à la fois un adage et un apophtegme, de même ce mot de Simonide, adressé à un convive silencieux lors d’un banquet : « Si tu es idiot, tu agis en sage, mais si tu es sage, tu agis en idiot » ; de même ceci : « Il convient que la femme de César soit non seulement innocente mais aussi exempte de tout soupçon », ce sont des apophtegmes sans pour autant être des adages. De même « Tu as l’habitude de t’asseoir sur deux sièges » est à la fois un proverbe et une insulte ; par contre « Ma mère jamais, mon père très souvent », ainsi que le mot de Turonios « Ils sont au moulin », ce sont des railleries mais pas pour autant des adages. Pourtant certaines expressions de ce genre sont si bien tournées qu’on pourrait facilement les classer dans les adages, comme « Je suis ami jusqu’aux autels ». On y trouve en effet la concision, le trait (l’aspect de la sentence/la sentence) et la figure de style.
Si j’ai un peu longuement développé ces considérations c’est pour qu’on ne s’attende à trouver dans cet ouvrage que ce qui tombe sous la dénomination d’adage ; mais c’est également pour que personne ne s’imagine que j’ai rien omis par négligence. Je n’ai laissé de côté, à dessein, que ce que j’ai jugé hors de mon propos.

JCS
Admin

Messages : 222
Date d'inscription : 08/04/2009

https://adagio.forumactif.org

Revenir en haut Aller en bas

Revenir en haut

- Sujets similaires

 
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum